7 jeux PC dangereusement immersifs
Certains jeux vidéos sont tellement bien réalisés qu'ils est littéralement impossible d'en décrocher.
Il existe beaucoup de types de jeux différents, mais mes préférés sont ceux qui racontent des histoires fantastiques. Et les meilleurs jeux ne se contentent pas de raconter l'histoire : il vous la font vivre !
Pour vous embarquer dans leur monde, les jeux vidéos disposent de moyens inaccessibles à d'autres médiums (livres, films, séries, bd, etc.)
Si vous avez besoin d'occuper votre temps libre sur la fin de l'été, ou cherchez une idée de jeu particulièrement innovant, ou simplement vous intéressez au game design en général, voici une petite compilation de jeux vidéos PC particulièrement immersifs que je tiens en haute estime.
Garanti 100% sans spoilers ! Captures Witcher3 : votre serviteurs. Pour les autres captures : Steam ou GoG.com.
The Witcher 3: Wild Hunt
Witcher 3 été tellement encensé par la critique qu'il n'y a plus vraiment à le présenter.
Étonnamment, j'ai trouvé l'histoire principale plutôt plate et inintéressante (chacun ses goûts). Je ne m'attarderai donc pas dessus.
Par contre, il y a beaucoup d'éléments du game design dont j'ai envie de discuter ici. Ces éléments sont tellement subtils et bien pensés qu'ils passent souvent inaperçus et font de Witcher 3 l'un des jeux les plus immersifs qui soient.
La scénographie des paysages
Les paysages sans Witcher 3 ne sont pas seulement beaux, il sont cohérents, réalistes et intéressants.
Il n'est pas très facile d'expliquer comment un paysage de jeu vidéo peut être intéressant. Dans beaucoup de jeux, le décor est juste ça : un décor dont on se fiche un peu.
Dans Witcher 3, il m'est fréquemment arrivé d'interrompre une tâche en cours parce que je devais aller voir ce qui se cachait derrière cette petite colline ; je devais escalader ce sentier pour admirer la vue ; je devais m'arrêter quelques secondes pour profiter de la sérénité du bord de ce petit lac ; je devais comprendre à qui appartenaient ces traces de pas s'enfonçant dans la forêt.
Dans Witcher 3, le paysage est clairement conçu avec autant de soin qu'un dialogue ou une quête, il vous parle et vous influence comme s'il était un Personnage Non-Joueur (PNJ) à part entière.
L'architecture des cavernes et donjons
L'exploration de cavernes et autres donjons est un classique des jeux d'aventure. Dans ces jeux, il existe fréquemment un mécanisme qui permet, une fois l'exploration terminée, de ressortir sans reparcourir en sens inverse le donjon désormais vide.
Mais là où ce mécanisme est très artificiel et un peu forcé dans des jeux comme Skyrim, il est ici parfaitement naturel et intégré à la structure même du paysage.
La chose est très subtile et par conséquent difficile à expliquer. Jamais je n'ai pensé « sympa, les concepteurs ont pensé à m'éviter une tâche pénible », je me suis toujours retrouvé dehors sans qu'une mécanique artificielle ne brise l'immersion.
La fluidité des dialogues
Les dialogues sont nombreux dans Witcher 3.
Écrire une arborescence de dialogues qui s'enchaînent de manière fluide alors que vous pouvez la dérouler dans n'importe quel ordre est probablement très difficile.
Dans bien des jeux, épuiser cette arborescence peut être répétitif et artificiel. « Oh, à propos, j'aimerais revenir sur tel sujet évoqué il y a quelques secondes. »
Dans Witcher 3, les dialogues sont tellement bien écrits que, peu importe l'axe que vous donnez à la discussion ou l'ordre dans lequel vous sélectionnez les différentes répliques, le discours des protagonistes s'enchaîne de manière fluide et complètement naturelle, comme si vous assistiez à une scène de film.
Le respect de l'identité de Geralt
À propos de dialogues, Witcher 3 est un jeu tiré d'une série de livres, et vous dirigez Geralt, un personnage ayant une personnalité propre.
Les dialogues sont tellement bien écrits que, même en sélectionnant l'un ou l'autre de deux choix complètement opposés, on a toujours l'impression que c'est exactement ce qu'aurait fait le personnage.
Dans une situation donnée, vous pourrez peut-être choisir d'aider un personnage ou l'envoyer promener : dans les deux cas, c'est exactement ce qu'aurait fait Geralt dans le livre.
Les textures et costumes
Les textures des costumes sont proprement ahurissantes. Le plus insignifiant des PNJ dispose d'un costume qui permet en un coup d'œil d'imaginer son histoire, son milieu socio-professionnel, son lieu d'habitation, etc.
Les quêtes liées au bestiaire
Dans l'univers imaginé par Andrzej Sapkowski, Geralt est un tueur de monstre en freelance : son job est de protéger la populace en dézinguant les créatures dangereuses plus ou moins magiques.
Dans le jeu, cela se traduit par la possibilité de trouver, dans différents villages, des offres d'emplois consistant à chasser tel ou tel monstre pour se faire un peu d'argent de poche.
De telles quêtes auraient pu servir de remplissage et être répétitives, que nenni ! Chaque chasse au monstre est scénarisée et permet d'explorer et découvrir de nouveaux éléments sur le bestiaire du jeu.
Les quêtes secondaires
Dans la plupart des jeux de rôles, le débutant se verra généralement confronté à des quêtes un peu rébarbatives. « Nettoie ma cave en zigouillant les dix gros rats noirs qui l'envahissent. Va me chercher cinq fleurs blanches pour constituer cette potion. Etc. »
Des tâches qui brisent l'immersion parce qu'elles sont répétitives et peu réalistes : jamais un roturier sans le sou ne s'attacherait les services d'un aventurier pour aller cueillir trois satanés fleurs qui poussent à moins de cinquante mètres.
Jamais dans Witcher 3 le joueur n'est confronté à de telles quêtes répétitives ou ridicules. Non, toutes les tâches annexes, mêmes les plus courtes, semblent naturelles et sont motivées par la position et l'histoire personnelle des protagonistes même les plus insignifiants.
La musique
Et puis, il y a la musique. Loin des pistes audio ambiantes purement illustratives qu'on trouve dans la plupart des jeux, la musique de Witcher 3 fait partie intégrante de l'univers fantastico-médiéval du jeu.
Bref ! Il n'y a ici rien de particulièrement innovant, mais ces éléments liés à la narration sont tellement bien conçus et réalisés qu'ils donnent naissance à un univers particulièrement vivant et cohérent.
Braid
Braid est un chef-d'œuvre d'innovation vidéoludique ! Un jeu dont les mécanismes s'imbriquent de manière tellement parfaite qu'il devrait figurer en exemple dans toute littérature liée au genre.
À première vue, Braid n'est qu'un mignon mais banal jeu de plateforme très similaire au tout premier Mario : vous incarnez Tim, petit personnage bondissant dans un monde coloré à la recherche de la princesse enlevée par un monstre quelconque. À chaque fin de tableau, vous apprenez que « la princesse est dans un autre château ».
De manière tout à fait brillante, le jeu intègre la possibilité pour Tim de remonter le temps : comme si on rembobinait une antique cassette VHS, une pression sur une touche efface les dernières actions du joueur, permettant de s'affranchir d'une erreur fatale ou de résoudre un puzzle ardu. Cette mécanique temporelle est très intelligemment exploitée pour proposer quelques puzzles dignes d'intérêts.
Mais ce qui ressemble au début à une simple repompe d'un game design très classiques s'avère être un double coup de génie.
Jonathan Blow, créateur de Braid, rend clairement hommage à un grand classique du jeu vidéo, mais il va subvertir ces éléments pour les intégrer à la narration.
Ainsi, Tim n'est pas un preux chevalier à la recherche d'une princesse enlevée de manière arbitraire. C'est en fait un jeune homme torturé incapable de surmonter une rupture difficile.
Les différents puzzles représentent métaphoriquement sa quête pour reconquérir son ancienne compagne et la mécanique temporelle son désir de remonter le temps pour réparer ses erreurs.
S'il n'y avait eu qu'un gameplay à base de plateformes et de puzzles temporels, Braid aurait été un petit jeu assez malin mais vite oublié. Mais le game design est utilisé pour renforcer métaphoriquement la narration, et cela confère au jeu une profondeur inattendue.
Et puis il y a la manière dont cette mécanique est utilisée jusqu'à la fin du jeu ! J'aimerais tellement vous expliquer à quel point Braid est génial ! Mais je ne peux pas, parce que je serai obligé de spoiler certains éléments et ce serait proprement criminel.
Je me contenterai de dire que je pense n'avoir jamais pris une aussi grosse claque en terminant un jeu.
Subnautica
Si vous avez la phobie des profondeurs, Subnautica n'est pas pour vous.
Subnautica démarre alors que votre vaisseau vient de s'écraser sur une planète pour une raison inconnue. Seul, sans aucun indice, vous émergez de votre capsule de sauvetage flottant au milieu de l'océan. À l'horizon, l'immense carcasse de votre vaisseau mère. Autour, rien ! rien que l'océan à perte de vue.
Alors, sans autre idée sur ce que vous pourriez bien faire, vous plongez…
Petit à petit, vous explorez le monde marin qui vous entoure ; vous recueillez des ressources vous permettant de produire des outils pour accéder à de nouveaux espaces du monde ; vous retrouvez les capsules désertes des autres rescapés disparus et tentez de comprendre cet univers et ses secrets ; et surtout, vous vous éloignez de votre capsule de départ, toujours un peu plus loin, un peu plus profond.
Subnautica est un jeu immersif (sans mauvais jeu de mot). L'interface est minimale, il n'y a pas d'affichage tête-haute, juste vos yeux et l'univers en face de vous. Votre masque de plongée obscurcit votre vision et le bruit de votre propre respiration est oppressant, seul au milieu de l'océan à des centaines de mètres de profondeur.
Vraiment, c'est une expérience prenante d'explorer le monde sous-marin de Subnautica. L'angoisse qu'on ressent à chaque fois qu'on s'éloigne de la zone de départ relativement tranquille, chaque fois qu'on descend quelques mètres plus bas.
Et l'univers est tellement riche, tellement grouillant de vie. Le monde ici n'est ni particulièrement hostile, ni particulièrement amical. Il est, c'est tout. Vous êtes un étranger parachuté dans un monde sauvage dans lequel les gros poissons mangent les petits et… eh bien ! vous n'êtes pas tout à fait au sommet de la chaîne alimentaire !
Disco Elysium
Au début de Disco Elysium, vous vous réveillez en slip sale sur le sol miteux d'une chambre d'hôtel dévastée, sans aucun souvenir de qui vous êtes ni ce que vous faites là. Pire ! votre dernière beuverie semble avoir été tellement épique que vous avez même tout oublié du monde qui vous entoure.
Peu à peu, vous découvrez que vous semblez être un flic torturé chargé de résoudre un meurtre sordide dans un univers glauque au possible.
Disco Elysium est un jeu très fortement basé sur les dialogues. La plupart du temps se passe à discuter avec les différents personnages du jeu et à tâcher de mieux comprendre le monde qui vous entoure pour faire avancer l'enquête. En ce sens, Disco Elysium fait très fortement penser à des titres comme Planescape: Torment.
L'originalité du jeu vient du mécanisme de construction de personnalité qui vous permet d'assigner des points à différents critères assez originaux. Ces critères sont comme des personnalités intérieures qui « s'invitent » et participent aux dialogues et influent sur les situations.
Ainsi, une forte empathie vous aidera à mieux comprendre vos interlocuteurs et ouvrira de nouveaux dialogues ; un « empire intérieur » développé vous dotera de facultés d'imaginations hors-norme et donnera à l'aventure un côté un peu surréaliste ; une bonne acuité visuelle vous permettra de réaliser à la volée des analyses balistiques et vous donnera des informations autrement inaccessibles ; une importante « vitesse de réaction » vous aidera à garder le swag en toutes circonstances ; un bon « esprit de corps » vous permettra d'obtenir beaucoup d'informations de la part de vos collègues flics ; etc.
Évidemment, il est impossible d'allouer des points à tous les critères. Par conséquent, le développement de votre psyché influencera très fortement le déroulement du jeu, vos possibilités de dialogues et les quêtes accessibles, et changera complètement votre expérience.
Jouerez-vous un flic altruiste et droit doté de réflexes de félin mais aussi intuitif qu'une barrière d'autoroute ? Ou peut-être un facho alcoolique emberlificoteur de première, capable de se sortir de n'importe quelle situation à coup de belles paroles ? Ou encore un communiste révolutionnaire misogyne extra-lucide capable de parler à votre cravate ? Ou encore un « clodo-flic » paranoïaque adepte des substances illicites. Etc.
C'est au moment où ma propre cravate m'a elle-même convaincue de la tremper dans une bouteille d'alcool pour en faire un cocktail Molotov que j'ai définitivement décidé d'intégrer Disco Elysium dans la liste de mes jeux les plus estimés.
Jamais personnage n'avait autant mérité le qualificatif de anti-héros que votre avatar dans Disco Elysium : complètement à l'ouest, la plupart du temps sapé comme un pangolin et sans-cesse confronté à ses errances passées. Pourtant, il est difficile de ne pas s'identifier à lui tant la personnalisation de sa psyché est poussée.
Le décalage extrême entre la morosité du monde qui vous entoure, les situations glauques que vous traversez et le délire total dans lequel nage votre avatar donne une force assez inédite à la narration du jeu.
Annoncer à une pauvre femme qu'on vient de retrouver son compagnon décédé tout en essayant de ne pas se laisser déconcentrer par sa cravate est une expérience assez impactante.
In fine, Disco Elysium est plus une quête intérieure qu'un jeu d'enquête. Un jeu à tester au moins une fois.
Outer Wilds
Outer Wilds est un jeu dont l'histoire est racontée par l'environnement.
Vous incarnez un membre d'une peuplade d'extra-terrestres plutôt primitive aux prémices de l'exploration spatiale. Embarquez dans votre fusée, décollez… Votre terrain de jeu : le système solaire, rien de moins.
Un système solaire, certes, mais un peu miniature. De votre monde d'origine, il ne faudra que quelques secondes pour rejoindre l'une ou l'autre des planètes qui gravitent autour du Soleil central. Une fois posé, vous pouvez démarrer votre exploration, entre environnements grandioses et ruines de civilisation éteinte.
Oh, mais il y a un twist : ou que vous alliez, le monde périclite. Une planète creuse s'effondre aspirée par un trou noir central ; une autre se retrouve enfouie sous les sables ; tiens ! est-ce qu'il n'y a pas moins d'étoiles que tout à l'heure dans le ciel ? Et qu'est-ce que c'est que cette lumière ? Boum ! Une supernova ! Vous êtes mort… avant de vous réveiller à votre point de départ.
Un peu comme dans Groundhog Day, vous êtes maintenant pris dans une boucle temporelle, condamné à revivre encore et toujours les dernières 22 minutes d'un univers agonisant. Charge à vous d'explorer l'univers de fond en comble pour comprendre pourquoi.
Outer Wilds est un monde ouvert dans lequel vous explorez l'histoire de manière non linéaire. Indice après indice, vous en apprenez plus sur les événements qui ont mené à la situation actuelle.
La mécanique narrative est intéressante à la base, mais c'est l'échelle du monde qui donne au jeu son intérêt. Chaque planète miniature, même si on peut en faire le tour en quelques secondes, recèle des secrets et des environnements tellement grandioses qu'on ne peut qu'être intimidé et ramené à notre taille de pauvre humanoïde confronté à quelque chose qui le dépasse.
Firewatch
Dans Firewatch, vous vous installez pour l'été dans une tour de surveillance au milieu d'un parc national, chargé de surveiller d'éventuels départs de feu.
Votre seul contact avec le monde extérieur : votre radio qui permet de dialoguer à distance avec Delilah, votre superviseuse, que vous n'avez jamais vu.
Dans Firewatch, vous ne pouvez faire que deux choses : vous balader dans l'environnement qui vous entoure, et parler avec Delilah de ce que vous voyez.
Les missions confiées par Delilah sont d'abord assez tranquilles mais peu à peu, des événements plutôt inhabituels vont donner à votre mission une nouvelle ampleur.
Le dialogue incessant entre vous et Delilah et la relation qui s'installe constituent le principal moteur narratif du jeu.
Hellblade: Senua's Sacrifice
Dans Hellblade: Senua's Sacrifice, vous incarnez Senua, jeune guerrière viking atteinte de troubles mentaux à la recherche de l'âme de son amant défunt.
Le concept de maladie mentale est central dans Hellblade, et la psychose de Senua constitue un élément du jeu à part entière.
La condition de Senua la rend sujette aux hallucinations, et l'empêche de bien différencier le monde réel de son monde intérieur.
Au fur et à mesure que Senua s'enfonce dans sa maladie, le monde qui vous entoure devient de plus en plus absurde et cauchemardesque.
Certains puzzles nécessiteront de placer Senua dans un certain état mental ce qui aura pour effet de transformer sa réalité, vous permettant d'accéder à de nouvelles zones jusque-là inatteignables.
La protagoniste est perpétuellement assaillie par de nombreuses voix intérieures, qui la déconcentrent, l'invectivent, la harcèlent ou la guident à l'occasion.
Même si, pour être honnête, j'ai trouvé le jeu un peu répétitif, Hellblade reste un jeu particulièrement innovant et immersif.
Conclusion
Le jeu vidéo est un médium unique avec des possibilités immersives hors du commun. Quand les concepteurs de jeux se saisissent de ces possibilités, le résultat peut tenir du chef-d'œuvre.
Si vous avez quelques idées de jeux vidéos particulièrement innovants d'un point de vue narratif, n'hésitez pas à m'en faire part.